RCF 16 octobre 2020
A écouter sur : https://rcf.fr/embed/2459569
Hier, nous étions le 15 octobre, un jour qui se drape chaque année d’une tonalité particulière car c’est la journée mondiale de sensibilisation au deuil périnatal. Ce deuil qu’on traverse lorsqu’on perd un enfant avant sa naissance, ou dans les heures ou jours qui suivent sa venue au monde.
C’est un sujet qui me tient particulièrement à cœur et qu’il est bon de sortir du silence car il touche des milliers de femmes et de couples chaque année. Il est parfois vécu comme un tsunami émotionnel, la souffrance ressentie n’étant d’ailleurs pas liée au stade de la grossesse, car certaines fausses couches, même précoces, sont de vrais deuils pour celles qui les traversent.
Ce sujet a été longtemps très tabou, il l’est encore, mais des progrès existent. Notre génération est mieux accompagnée que les précédentes. Par exemple, la législation a évolué ces 30 dernières années, et permet maintenant d’inscrire l’enfant dans le livret de famille, dès lors qu’il y a possibilité de produire un certificat médical d’accouchement, et cela en principe dès 15 semaines d’aménorrhée, soit 3 mois de grossesse. Quand c’est possible, les parents peuvent choisir d’organiser aussi des funérailles. Cette considération envers le corps et cette possibilité de vivre des rites de deuils, constituent un grand pas en avant. Je trouve très puissante cette phrase de Tchekhov : « Enterrer les morts et réparer les vivants ». Les rites funéraires sont en effet un critère d’humanisation et la période que nous venons de traverser nous a montré à quel point leur absence, imposée par la crise sanitaire, avait été source d’immenses blessures.
C’est un deuil particulier car d’une certaine manière, c’est le deuil d’un futur. On pleure celui qui était attendu, et avec qui, malheureusement, nous avons peu de passé et de souvenirs auxquels nous raccrocher.
C’est important pour ceux qui restent les bras si vides et le cœur si lourd de se sentir reconnus dans leur deuil pour le vivre pleinement, cela autorise en quelque sorte à être dans le réel de la souffrance. Je crois que « vivre ce qui doit se vivre » a quelque chose d’apaisant, c’est aussi le socle sur lequel repose la reconstruction et le premier pas sur le chemin de la consolation. Oui, être consolé, sans oublier.
« Est-ce qu’une femme peut oublier son petit enfant ? Ne pas chérir le fils de ses entrailles ? Même si elle pouvait l’oublier, moi, je ne t’oublierai pas ». Ce Murmure d’Isaïe est une invitation à regarder vers le Très-Haut, vers celui qui tient ses promesses, en son temps, d’essuyer toute larme de nos yeux et de nous garder dans l’espérance.